miércoles, 8 de abril de 2009

REPORTAJE A LAS "LUCHADORAS DEL AGREAL" EN "FRANCIA"

Son visage anguleux flotte presque derrière ses lunettes cerclées. Du coup, ses yeux clairs ont l'air effrayé par l'affaire et surtout pressé de raconter. Vite, vite, avant de prendre le risque de perdre le fil. Alors, Chantal Midenet, 57 ans, saisit à pleine main le dévidoir de son existence et raconte ses douloureuses années de souffrances physiques et psychologiques. La perte de «14 kilos dont 7 en 5 jours». Un calvaire qui porte le nom d'Agréal (marque déposée), un médicament longtemps administré dans le traitement de la ménopause et aujourd'hui interdit à la vente.Tout commence en 2005. Comme de nombreuses quinquagénaires, Chantal, en proie à des bouffées de chaleur, consulte son généraliste. Elle lui prescrit d'abord du Traitement Hormonal Substitutif (THS) puis, faute de résultat, de l'Agréal. «Tout en m'indiquant qu'il était interdit en Espagne». Des doutes l'assaillent ? «Non, je lui faisais confiance. Quand je pense que je lui apportais souvent des pots de confiture...». Le traitement semble convenir, aussi «elle m'a fait trois ordonnances de six mois jusqu'au 25 février 2007».Puis tout vacille. «Les derniers mois de prise,
je n'avais plus envie de sortir, comme si j'étais "absente", et je commençais à grossir». Faute d'être entendue par son généraliste, elle en consulte un autre qui l'enjoint d'arrêter immédiatement les médicaments. «J'étais tout le temps fatiguée, j'avais très froid, de très fortes douleurs dans le ventre. Et le coeur qui battait, comme s'il allait sortir de ma poitrine». Et pourtant, le pire est à venir... Le 7 mars, le jour où elle aurait dû reprendre une plaquette d'Agréal, c'est le début de la descente aux enfers.
« J'étais en état de manque, je claquais des dents »
«Je ne pouvais plus tenir debout, marcher, écrire, mémoriser les choses. J'avais l'impression de sentir la vie partir, s'étioler. J'étais en manque... de neuroleptiques ! Je claquais des dents, j'étais secouée de tremblements.» C'est l'incompréhension. Rien ne pouvait expliquer un tel état de souffrance. Chantal soupçonne alors très vite Agréal. «Je ne prenais aucun médicament à part un antiépileptique suite à un anévrisme cérébral.» Elle veut savoir mais aussi trouver une main tendue pour sortir la tête de l'eau.«Un matin de décembre, j'ai eu des idées noires» reconnaît-elle. Entourée des soins de son époux, Chantal reprend doucement goût à la vie. Toutes les femmes sous Agréal n'auront pas cette chance. C'est ce que va découvrir Chantal en surfant sur le Net. Pourtant réfractaire à la chose informatique, elle s'inscrit sur des sites de dialogues. Et là, c'est l'électro-choc. Les témoignages recueillis par l'Aaavam (¹) sont accablants : dépression, tentatives de suicides, tremblements, dyskinésies tardives... jusqu'à dix ans après la prise de l'Agréal.«Et combien de femmes ne connaissent pas le lien de cause à effet entre leurs troubles et le médicament ? Les familles ont le droit de savoir» plaide-t-elle. Des lettres sont bien parvenues au ministre de la Santé. «Elle compatit mais informe que les effets secondaires ne sont pas reconnus» se désole Chantal. Elle aimerait tellement que justice soit faite à l'égard de «ces médecins et pharmaciens qui ont continué à administrer ou délivrer de l'Agréal après la date de retrait décidé par l'Afssaps (²), affirme-t-elle, et qui connaissaient trop bien les risques encourus par les usagers». Surtout qu'il était rangé sous les neuroleptiques dans le Vidal !Plus de deux ans après, Chantal se remet très lentement grâce à un homéopathe et une grosse dose de courage et de pugnacité. La rechute n'est jamais bien loin quand le froid se fait tenace. «Je ne peux pas dire si, un jour, cela s'arrêtera...».
(¹) Aaavam : Association d'aide aux victimes des accidents des médicaments.(²) Afssaps : Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.

REPÈRES
AGRÉAL
L'Agréal, mis sur le marché en 1979, était prescrit à plus de 200 000 de femmes en France, chaque année. Le marché était, pour sa part, de 4 à 5 millions de femmes sur le plan national. C'était un dérivé du Dogmatil, un neuroleptique découvert en 1965 (pour rappel, les neuroleptiques traitent certaines maladies psychiatriques comme la schizophrénie).Après le retrait du marché espagnol en 2005, des centaines d'Espagnoles ont porté plainte au civil et au pénal. En France, l'Aaavam envisageait une action groupée en dommages et intérêts contre le laboratoire et distributeur, Sanofi-Grünental (source : Santé Magazine, n°85).
http://www.ledauphine.com/index.jspz?article=107707 La Rédaction du DL le 11/03/09 à 05h01

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